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La châtaigne est un fruit d’automne, issue d’un arbre mythique le châtaignier, autrefois appelé
 « arbre à pain » car son fruit, très attendu, nourrissait aussi bien les humains que les animaux. Palliant , aux temps les plus difficiles, la durée d’ une saison à une certaine malnutrition voire famine. (Lire petite histoire « bébé châtaigne »)  Attention certaines châtaignes sont des marrons ! Non pas venu du marronnier, ceux là sont toxiques ! Mais bien du châtaignier. Le marron est tout simplement une châtaigne dont l’amande n’est pas cloisonnée par une peau intérieure.


Tout est bon dans le châtaignier ! Tout peut être utilisé ! Le fruit pour la nourriture mais aussi le bois, les feuilles et bogues, qui, une fois broyées nourrissent le sol. Les beaux taillis, exploités, donnent le « merrain » qui est une bille d’un diamètre suffisant pour permettre le sciage de lamelles épaisses qui deviendront parquet où lambris mais peuvent aussi servir à la fabrication de barriques et tonneaux pour le vin. Ils peuvent également être  utilisés en piquets pour vignobles où vergers. Le plus gros, la « carassonne » sert de tuteur à la vigne adulte.

Ils soutiennent le cep mais aussi les fils de fer tendus, qui dirigent les longs sarments porteurs de raisins. Les « marquants » plus courts et plus légers sont  pour les jeunes plants. En des temps plus anciens, les tiges de diamètre inférieur, étaient fendue et épluchées pour la production du « feuillard » longues lattes souples utilisées comme cercles de barriques. Les épluchures servaient à recouvrir la cabane forestière, abri du feuillardier. Aujourd’hui, parfois sèches, ces tiges vont au charbon de bois, à la papeterie où depuis quelques années au broyage en copeaux destinés aux chaufferies et réseaux chaleur bois. Les plus gros arbres donneront éventuellement un bois d’œuvre fort apprécié pour sa solidité aux intempéries et sa résistance dans le temps. Avec, comme vertu annexe, de plus où moins dissuader les araignées de décorer les poutres de leurs toiles indésirables (ref Château de Biron )

Le sud de la Dordogne, plus particulièrement la région qui s’étend de Monpazier à Villefranche du Périgord est riche de bâtiments, habitations où dépendances, parfois restaurés où apparaissent encore, et sont souvent conservés, des poutres, linteaux et autres étagères séculaires en bois de châtaignier.





 
Les décennies des années 1960 à 1980 ont bien manqué de faire disparaître du Périgord

 (et sans doute d’ailleurs) les vieux arbres et du même coup, les fruits.

Premières responsables, différentes maladies qui ont entraîné le dépérissement de ces arbres vénérables, mais aussi, l’évolution des pratiques agricoles qui se recentraient (par nécessité) vers des rentabilités plus rapides, un marché aléatoire , l’absence de main d’œuvre dans les fermes, mais aussi l’opportunité de commercialiser le bois des vieux arbres. Des négociants ont sillonné le territoire et des milliers de camions de troncs issus des vieux châtaigniers, dépérissant où pas, ont pris le chemin des usines de tanin. (Le tanin extrait du bois de châtaignier servait au traitement des cuirs épais, des courroies de transmission, au désincrustage des tuyaux de locomotives et chaudières) Un vrai massacre !



Fort heureusement de courageux amoureux de cet arbre ont choisi de le replanter en vergers, de relancer la production et le marché en structurant une vraie filière par le biais d’un syndicat des producteurs de châtaignes et marrons qui a évolué vers une union interprofessionnelle, demandeuse de reconnaissance par un signe de qualité de type AOC  Périgord, dont le dossier d’obtention est en cours.

La récolte s’effectuait à la main à l’aide de longues pinces en bois. C’était tout simplement une jeune branche de châtaignier, fendue et recourbée. Cette récolte donnait lieu à des rassemblements familiaux où de voisinage, on s’entraidait dans la bonne humeur, on emportait le casse croûte pris en commun et le fastidieux ramassage qui courbait le dos devenait plus léger en groupe . (Lire « La grève de Marcelle ») Les gamins en profitaient pour faire quelques blagues (Lire « Le tombereau  à bascule ») D’autres s’adonnaient au ramassage en solitaire (en général les femmes où les anciens) qui, si la châtaigneraie était éloignée,  demeuraient sur place, dormant chez l’habitant où dans une grange,  jusqu'à ce que tout soit tombé et ramassé. (Lire « Les vacances de Nina »)

Dans certaines régions on conservait les châtaignes dans l’eau. Enfermées dans une sorte de nasse en osier. Ce système permettait un certain tri car celles qui flottaient étaient en général attaquées par les vers. Mais dans la plupart des cas, chaque ferme possédait son « Sécadou » Un petit bâtiment spécialement réservé au séchage des châtaignes. On entreposait les fruits sur la partie haute, sorte de plancher à claire voie aux lattes suffisamment rapprochées pour retenir les châtaignes. Dessous, on allumait un feu à même le sol. Un feu modéré, sans grandes flammes mais constant jusqu'au séchage optimal qui permettait la conservation. (Lire « La cuite de Raoul ») Une variété du sud Dordogne « Le Pelon fin » permettait un autre mode de conservation au cœur de la châtaigneraie. Elle a la particularité de tomber bien enfermée dans sa bogue, ce qui rend son ramassage difficile. En contrepartie amassée en andains où en gros tas sous les arbres elle se conservait ainsi jusqu’en janvier. Il suffisait, au gré des besoins, d’aller piocher dans la réserve.

 Cette châtaigne est par ailleurs l’objet d’une amusante polémique entre les gens de Monpazier et ceux de Villefranche. Il s’agit en fait d’une « Roussette » Oui, me direz vous ! Mais Roussette de Monpazier où Roussette de Villefranche ? La différence ?  Est elle totalement subjective  où bien réelle ? Je dois bien reconnaître avoir constaté une légère nuance dans la couleur de la robe de celles qui m’ont été présentées ! Une robe luisante, striée, d’un bel acajou clair pour l’une et plus soutenu pour l’autre. A part cela, même taille, même précocité, même saveur ! A vous de juger !

Le broyage des châtaignes sèches fournissait une farine fine qui pouvait être utilisée à faire du pain (mélangée à de la farine de blé), des gâteaux où une sorte de bouillie, cuite en jetant la farine dans l’eau bouillante en tournant à mesure avec une branche de châtaignier à trois dents, de façon à ne pas faire de  grumeaux. Un peu façon Polenta. On obtenait une sorte de purée,  qui « tenait au corps » car la farine de châtaigne avec 75% de glucides possède  des vertus nutritives et énergétiques. La châtaigne fraîche est riche de 38 % de glucides, 5 % de fibres mais pauvre en protides et lipides. Elle contient également de la vitamine C et du potassium entre autres minéraux. Pour les cuire dans la peau il était nécessaire de les réhydrater par trempage une nuit dans l’eau. Fraîches où séchées, la cuisson s’effectuait dans un « toupi » appelé « pot à châtaignes » petite marmite ventrue, en fonte, dont on tapissait le fond avec des feuilles de figuier. On ajoutait les châtaignes recouvertes d’eau et la cuisson était parfaite quant toute l’eau était évaporée. Autre mode de cuisson « les Birols » Cuits sur le feu, dans une poêle trouée, après avoir fait une légère entaille dans la peau, sinon gare à l’explosion ! Où carrément sous la cendre dans l’âtre (lire Souvenirs du Limousin)

Une fois grillées, il fallait les éplucher (ruffer) à l’aide d’un « Ruffadou » pièce de bois articulée comme une pince, aux mâchoires crantées. Où, déposées au fond d’un tronc évidé, en les pilant avec une pièce de bois à poignées dont l’extrémité crantée où hérissée de clous séparait peau et amande. Où encore en trépignant dessus avec des chaussures dont la semelle était munie de longs clous.

Les brisures occasionnées étaient soigneusement récupérées et servaient au gavage des oies où des canards. Une châtaigne entière pouvait aussi être utilisées en fin de gavage pour boucher l’œsophage de l’animal et éviter les remontées de grains de maïs. De nos jours on la consomme toujours bouillie où grillée, (birols et marrons chauds dans leur cornet de papier sur les marchés hivernaux) en légumes avec de la volaille où du gibier, mais aussi en confiture, confites au sucre « marrons glacés » où conservée dans l’alcool, La châtaigne sert aussi à l’élaboration de boissons apéritives.

A suivre…
















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